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Temps nuageux, avec une probabilité de sécheresse

Photo: N. Palmer (CIAT)
 

Selon le rapport de 2007 du Groupe intergouvernemental sur les changements climatiques (PDF), dans un monde plus chaud de 4C les rendements du blé pourraient diminuer de 60% ou augmenter de 40%. Comment la science peut elle gérer de tels niveaux d'incertitude de sorte à aider, plutôt qu’á paralyser, les prises de décisions politiques? Une partie de la réponse réside dans l'amélioration de l’estimation  des incertitudes et des risques, comme sont en train de le faire actuellement des programmes scientifiques multidisciplinaires tels que EQUIP l'université de Leeds ). Une autre partie de la réponse se trouve dans une meilleure communication entre Science et Politique.

L’article de Nick Pidgeon et Baruch Fischhoff Le rôle des sciences sociales et de la décision dans la communication de l’incertitude liée aux risques climatiques, passe en revue la vaste série d’opinions sur la communication des risques climatiques pour se concentrer enfin sur celles qui à l’évidence fonctionnent. Les auteurs partagent largement les opinions exposées par le Rapport Stern sur l'économie du changement climatique,  et les Académies Nationales, selon lesquelles nous devrions nous concentrer  sur les risques, les coûts  et les bénéfices de voies spécifiques d’action et non pas sur les persistantes incertitudes qui entourent les déterminants, les processus et les impacts climatiques. Plutôt que d’inviter à des délais infinis - le temps qu’on cherche à obtenir de plus grandes certitudes - cette orientation permettrait de favoriser la prise de décisions.

Pidgeon et Fischhoff offrent quelques indications utiles issues de recherches empiriques. Selon l’une d’entre elles, particulièrement intéressante, les non scientifiques sont en meilleure mesure de prendre des décisions lorsque les incertitudes sont exprimées en nombre plutôt qu’en qualificatifs verbaux, comme «probable» ou «improbable». Les auteurs notent que l'on manque de recherches rigoureuses sur l'efficacité des communications du GIEC. En effet, des récents rapports  commandés et indépendants du GIEC ont exhorté á l’utilisation d’un langage beaucoup plus cohérent pour signaler les types et les niveaux d’incertitude.

Notamment, différents décideurs ont besoin de comprendre différents aspects des risques climatiques, et à différentes échelles spatiales et temporelles. Une entreprise qui produit des marchandises agricoles au niveau mondial voudra connaître la probabilité que ces risques soient corrélés à des pertes de rendements dans les différentes régions. Un agriculteur qu’en à lui sera peut-être plus concernés par le risque de sécheresse ou par un démarrage tardif de la saison de croissance cette année. Cependant, l’information sur les risques spécifiques est d’autant plus utile si les décideurs peuvent la mettre en relation avec leurs propres modèles mentaux des processus sous-jacents et des causes d'incertitude.

Des constats comme celui-ci ont conduit Pidgeon et Fischhoff à proposer une approche générique portant sur une «écoute stratégique» et une «organisation stratégique». L’écoute stratégique suppose de façonner les communications en fonction  des expressions des acteurs sur leurs propres besoins de connaissances et des options pour l'action. Pour faire cela de façon effective il faut une organisation stratégique: employant une équipe qui comprend non seulement des gestionnaires scientifiques et des experts thématiques (climatologues, agronomes, etc), mais aussi des experts en sciences sociales et de la communication qui puissent concevoir des modes de communication fondées sur les évidences, ainsi que des experts scientifiques dans la décision qui puisse raccourcir la brèche entre la politique et la science.

Des équipes pluridisciplinaires supposent une réallocation des budgets de la Science. Un groupe de professionnels en Analyse du Cycle de Vie a récemment proposé un «principe des trois-tiers» pour dépenser un tiers des ressources d’un projet dans le travail avec les parties prenantes  destiné à développer une vision commune des enjeux et des objectifs, un tiers dans l’aide à l’interprétation et application des résultats et seulement un dernier tiers dans la recherche scientifique en elle-même. Sans aucun doute, toute organisation scientifique qui s'intéresse à informer la politique devrait considérer les avantages et les inconvénients de ce principe - et la reconfiguration radicale qu'il pourrait exiger.

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Ce blog fait partie de la série AgClim Letters, un bulletin mensuel sur la politique scientifique écrit par Sonja Vermeulen, directrice de recherche du programme du programme de CGIAR 'Changement Climatique, Agriculture et Sécurité Alimentaire' (CCAFS). Inscrivez-vous pour le recevoir comme un bulletin électronique.