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L'efficacité des émissions: certains animaux sont-ils plus égaux que d'autres?

Photo: ILRI/Mann
 

Le récent rapport Prospective sur l'avenir de l'alimentation et l'agriculture fournit une riche base de référence pour orienter les décisions actuelles qui assureront l'alimentation et l'agriculture dans les décennies à venir. Néanmoins, un message frappant qui se dégage de ce rapport est le fait qu’une science solide ne suffit pas á orienter la politique.

L’examen détaillé d’une seule de la centaine d’études de référence montre en effet á quel point, si bien l’évidence technique peut informer, elle peut substituer un consensus sociétal.

L’article de Tara Garnett Où se trouvent les meilleures opportunités pour réduire les émissions de gaz à effet de serre dans le système alimentaire (y compris la chaîne alimentaire)? est l’un des rares qui répond à la question posée dans le titre. Les mesures visant á une amélioration du stockage de carbone, une plus grande efficacité, et des  changements des modes de consommation représentent les meilleures d'options, mais à condition qu’elles soient abordées conjointement. Pas de quoi se surprendre, tout est dans le détail.

Dans les pays à haut revenus, les émissions totales tout au long de la de la chaîne alimentaire sont réparties 50:50 entre les activités pré-récolte - principalement l'agriculture, ainsi que la fabrication d’intrants comme les engrais - et les étapes post-récolte comprenant la transformation, le conditionnement, le stockage, la distribution et la préparation des aliments. L’article de Garnett ne considère pas l’évidence bien plus rare relative aux pays à faible et moyens revenus, or une analyse récente de l'Inde estime que seulement 13% du total des émissions proviendrait de ces stades post-récolte, et ce en raison du transport et la réfrigération bien moins importants.

L’agriculture constitue donc le principal défi mondial, et á la fois une opportunité, pour réduire les émissions de la chaîne alimentaire. Parmi les différentes options possibles certaines des meilleures sont liées á l’adoption de mesures d'efficacité permettant de réduire les émissions par unité d’intrants et extrants. On peut atteintes des augmentations impressionnantes des rendements dans la production de viande bovine et de produits laitiers -les secteurs agricoles responsables des plus importantes intensités d’émissions- par le biais de la sélection de plantes et d’une alimentation spécialisée, au dépend du bien-être animal.

Il est important de constater que la façon dont nous mesurons l'efficacité détermine lequel  des systèmes d'élevage dégage le moins d'émissions. La production intensive d’animaux monogastriques (porcs et volailles) émet le moins en kg d’équivalent de CO2 par kg de produit. Par contre, en Afrique où l'anémie affecte 68% des jeunes enfants et la plupart des fermes sont non-mécanisées, on peut plutôt envisager des  mesures en kg équivalent CO2 par g de fer, ou par unité de puissance de traction des charrues et des charrettes. Et dans ce cas les vaches s’en sortent mieux.

Des mesures des émissions de gaz à effet de serre par unité de terre ont été proposées comme une alternative judicieuse aux mesures quantitatives de la CCNUCC. Garnett explique comment l'élevage intensif peut, paradoxalement, apparaitre comparativement défavorable en équivalent CO2 par hectare par rapport au pâturage extensif, en particulier si la mesure concerne des terres cultivées á haut potentiel consacrées à la production d'aliments pour animaux. Les mesures basées sur les ressources, telles que les émissions par unité de services environnementaux, sont également cohérentes. L orsque la mesure est faite par unité de terre á haut potentiel et aliments pour le bétail ayant été épargnés d'utilisation, les porcs domestiques et les poulets - à très petite échelle, mais fortement intégrés dans les cycles des nutriments et de l'énergie - semblent être plus efficaces.

 
La façon dont les pays trouvent leurs chemins dans les compromis inhérents à ces différentes mesures d'efficacité dépend de leurs groupes d'intérêts et leurs priorités politiques. L’agriculture fournie une série de services qui ont des valeurs différentes pour différentes personnes. Il ne s’agit pas simplement de déterminer ce qui fonctionne le mieux du point de technique, mais de savoir comment valoriser les milieux naturels, les cultures alimentaires, le développement rural, les préoccupations éthiques et ainsi de suite. Les agriculteurs pauvres et les consommateurs doivent naturellement faire partie de ce débat.

 


 

Ce blog fait partie de la série AgClim Letters, un bulletin mensuel sur la politique scientifique écrit par Sonja Vermeulen, directrice de recherche du programme du programme de CGIAR 'Changement Climatique, Agriculture et Sécurité Alimentaire' (CCAFS). Inscrivez-vous pour le recevoir comme un bulletin électronique.