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juil 19, 2013

Ressource primordiale pour la production énergétique et alimentaire, l’eau du bassin de la Volta pourrait devenir de plus en plus rare en raison du changement climatique

La rivière Volta du ciel. Photo: Akissa Bahri (IWMI)
Selon une étude, l’inaction mènera à « un recul majeur » dans le développement économique et la sécurité alimentaire pour les populations les plus pauvres du Ghana, du Burkina Faso et d’autres pays d’Afrique de l’Ouest

ACCRA, GHANA (19 juillet 2013)— Une nouvelle étude publiée aujourd’hui révèle que le changement climatique pourrait entraîner la perte de grandes quantités d’eau dans le bassin de la Volta et que les projets hydroélectriques prévus pour augmenter la production énergétique et alimentaire ne parviendront à répondre qu’aux besoins actuels. La Volta et ses affluents est la principale source d’eau pour près de 24 millions de personnes au Ghana, au Burkina Faso et dans quatre autres pays riverains.

Précisément, les chercheurs de l’Institut international de gestion de l’eau (IWMI, International Water Management Institute) et ses partenaires ont conclu que les effets combinés de températures plus élevées et de précipitations réduites empêcheraient les projets hydroélectriques actuels et à venir dans le bassin de produire autant d’énergie en 2100 qu’aujourd’hui. Entre-temps, seul un tiers des besoins d’eau pour l’irrigation pourrait être satisfait.

L’IWMI et les autres centres impliqués dans le Programme de recherche sur le changement climatique, l’agriculture et la sécurité alimentaire (CCAFS, Research Program on Climate Change, Agriculture and Food Security) du CGIAR (Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale) attirent l’attention sur l’étude consacrée à la Volta alors que les responsables africains se réunissent au Ghana pour la Semaine africaine des sciences agricoles 2013, qui a pour thème « L’Afrique nourrit l’Afrique ».

 

 « Une réserve d’eau peu sûre pour l’irrigation aura de sérieuses conséquences dans une région où la plupart des habitants sont agriculteurs. Au-delà de cela, il est urgent de faire en sorte que la production alimentaire dépende moins de systèmes d’irrigation alimentés par les précipitations et donc des caprices du climat. Cette étude montre que cette stratégie n’est pas aussi fiable que nous le pensions », explique Matthew McCartney, PhD, chercheur et hydrologue à l’IWMI, qui fait partie du CGIAR, un consortium international d’instituts de recherche agricole. M. McCartney est le principal auteur de l’étude, The Water Resource Implications of Changing Climate in the Volta River Basin (Les conséquences du changement climatique sur les ressources en eau dans le bassin de la Volta), à laquelle ont également participé des scientifiques du Conseil pour la recherche scientifique et industrielle du Ghana (Council for Scientific and Industrial Research) et l’Institut allemand de Potsdam pour la recherche sur l’impact du climat.

                                                                                                

Les modèles climatiques montrent que les températures dans le bassin de la Volta vont augmenter jusqu’à 3,6 °C sur les cent prochaines années – ce qui pourrait considérablement augmenter la quantité d’eau perdue par évaporation, alertent les scientifiques. Ils affirment aussi que les précipitations annuelles moyennes pourraient baisser d’environ 20 %. Matthew McCartney et ses collègues ont calculé que les flux d’eau dans la région de la Volta pourraient baisser de 24 % d’ici 2050 et de 45 % d’ici 2100, privant les pays riverains de l’eau dont ils ont besoin pour faire tourner les turbines des centrales hydroélectriques et alimenter les fermes.

 

 « Le développement intelligent des ressources d’eau est un aspect crucial de “L’Afrique nourrit l’Afrique”, et nous avons besoin de comprendre comment le changement climatique va transformer l’accessibilité à l’eau dans les régions les plus vulnérables comme le bassin de la Volta », dit Robert Zougmoré, le responsable des recherches CCAFS en Afrique de l’Ouest. « Cette étude souligne le besoin accru d’innovation et de coopération autour de la Volta pour s’assurer que les agriculteurs de la région puissent s’adapter au défi lancé par ces nouvelles conditions dues au réchauffement climatique. » Le CCAFS finance l’étude avec le ministère allemand de la Coopération économique et du Développement.

Le bassin de la Volta s’étend sur 402 000 kilomètres carrés, principalement situés au Ghana et au Burkina Faso, mais aussi au Bénin, en Côte d’Ivoire, au Mali et au Togo. La population du bassin, 19 millions d’habitants en 2000, devrait atteindre les 34 millions d’ici à 2015. L’agriculture représente 40 % de l’activité économique du bassin. À mesure que les précipitations sont de moins en moins régulières en raison du changement climatique, les chercheurs et les décideurs politiques ont étudié une transition vers les nappes phréatiques et d’autres types d’irrigation. Pendant ce temps, les centrales hydroélectriques sont considérées comme essentielles au développement industriel et à l’expansion des opportunités économiques.

Le bassin de la Volta héberge déjà l’énorme barrage d’Akosombo, qui a créé le lac Volta, le plus grand lac artificiel, et la quatrième plus grande réserve d’eau au monde. Sans oublier, le projet de barrage controversé de Bui, qui est censé fournir 400 mégawatts à l’insuffisant réseau électrique ghanéen, et permettre l’irrigation de 30 000 hectares de terres agricoles. Mais l’étude prédit que ces projets et beaucoup d’autres prévus dans le bassin n’atteindront pas leur plein potentiel à cause du changement climatique.

Par exemple, l’étude explique qu’en 2050, les installations hydroélectriques ne pourront fonctionner à plus de 50 % de leur potentiel faute d’être alimentées suffisamment en eau. Et d’ici à la fin du siècle, elles ne pourront tourner qu’à 25 %. Les projets d’irrigation se porteront mieux, du moins au début. Selon l’étude, si tous les projets prévus sont achevés, ils pourraient doubler le volume d’eau disponible jusqu’à 2050. Mais d’ici 2100, avec les pertes d’eau qui s’accumulent, le système fournira à peine plus d’eau que les projets d’irrigation aujourd’hui, ce qui sera largement insuffisant pour répondre à la demande.

 

L’étude montre que les pertes d’eau dans le bassin seront particulièrement difficiles pour les agriculteurs pauvres des zones rurales, où l’agriculture est la principale source d’alimentation et de revenus. En plus des problèmes liés aux projets d’irrigation à grande échelle, l’irrigation à petite échelle, très courante dans la région, sera aussi touchée. L’étude de l’IWMI révèle que les nappes phréatiques seront plus difficiles à exploiter, « en particulier les nappes peu profondes » généralement utilisées dans les communautés rurales.

 

Matthew McCartney prévient que les prédictions concernant les ressources en eau dans le bassin de la Volta ne sont pas certaines. Mais il explique que les données fournissent suffisamment de signaux d’alerte pour nécessiter une réflexion des décideurs politiques sur un panel d’options plus résilientes concernant l’agriculture et l’énergie afin de pouvoir affronter le changement climatique. Par exemple, l’étude suggère de réfléchir à un éventail plus large de sources d’énergies renouvelables, comme le vent et le soleil. Les options de stockage d’eau ne doivent pas être limitées aux projets utilisant de grands barrages, expliquent les chercheurs. Une égale considération doit être accordée aux systèmes alternatifs de stockage d’eau.

 

Selon M. McCartney, la solution pour les agriculteurs pourrait consister à améliorer les réserves d’eau des nappes phréatiques disponibles dans les zones rurales en « rechargeant » la nappe aquifère locale avec de l’eau prélevée dans les rivières ou les réservoirs. Cette pratique est de plus en plus courante dans les régions en situation de stress hydrique. L’étude appelle aussi à la poursuite des projets, relativement simples et à petite échelle, de stockage d’eau comme la construction de petits bassins dans les fermes rurales et l’utilisation de réservoirs avec des toits réduisant l’évaporation.

« L’Afrique a du potentiel en termes d’innovations et de solutions. Nous avons besoin d’exploiter cette innovation et de la combiner avec des solutions dont nous savons qu’elles peuvent nourrir l’Afrique », dit Matthew McCartney. « La conférence de ce week-end présentera plusieurs de ces solutions. »
 

Téléchargez le rapport The Water Resource Implications of Changing Climate in the Volta River Basin (Les conséquences du changement climatique sur les ressources en eau dans le bassin de la Volta)

 

Voir photos du bassin de la Volta


À propos du CCAFS
Le Programme de recherche sur le changement climatique, l’agriculture et la sécurité alimentaire (CCAFS, Research Program on Climate Change, Agriculture and Food Security) du CGIAR (Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale) est un partenariat stratégique entre le CGIAR et Future Earth, mené par le Centre international d’agriculture tropicale (CIAT). Le CCAFS rassemble les meilleurs chercheurs en science agricole, recherche en développement, science climatique et science du système terrestre, afin d’identifier et d’aborder les plus importantes interactions, synergies et échanges entre changement climatique, agriculture et sécurité alimentaire. Pour plus d’informations, visiter www.ccafs.cgiar.org.

À propos de l’IWMI

L’Institut international de gestion de l’eau (IWMI, International Water Management Institute) est une organisation de recherche scientifique à but non lucratif spécialisée dans l’utilisation durable des ressources en eau et des terres dans les pays en développement. Ses quartiers généraux se trouvent à Colombo, au Sri Lanka, avec des bureaux régionaux à travers l’Asie et l’Afrique. L’IWMI travaille en partenariat avec les gouvernements, la société civile et le secteur privé pour développer des solutions évolutives de gestion de l’eau pour l’agriculture ayant un réel impact sur la réduction de la pauvreté, la sécurité alimentaire et la santé de l’écosystème. Pour plus d’informations, visiter www.iwmi.org